Cinquieme Anniversaire de la Commission Mondiale des Barrages

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Excellencies,

Mr. Prime Minister, Head of Government

Mr. Minister of the Environment and Nature Protection

Subject : Prerequisites for the admissibility of Environmental Impact Studies (EIA) of the LOM – PANGAR reservoir dam project

Considering Law N ° 90/053 of December 19, 1990 on freedom of association in Cameroon, and Law N ° 99/014 of 12/22/1999 relating to Non-Governmental Organizations (NGOs) which recognize the critical role of NGOs for the economic, social, environmental and cultural development of the Nation,

Considering the significant contribution of NGOs to improve the consideration of environmental and social factors before, during and after the completion of major projects such as the construction of the Chad – Cameroon pipeline,

Considering that the construction project of the Lom – Pangar reservoir dam in the eastern province of Cameroon is classified in the category of large dams and that it will have a considerable impact on the environment and the life of local communities,

  • Excellencies, we come with this letter on this day of the 5th Anniversary of the World Commission on Dams (CMB), to present to you some priority actions which constitute, within the framework of the construction of large dams, prerequisites for the admissibility of Impact Studies Environmental (EIA). These prerequisites are valid for the Lom – Pangar reservoir dam project and refer to:
  • To the recommendations of the World Commission on Dams;

  • The World Bank Guidelines for Dams.

  • To Law No. 96/12 of 9 August 1996 on the framework law relating to the environment;

  • In decree N ° 2005/0577 / PM of 23 February 2005 setting the terms for carrying out EIAs;

  • With the Order N ° 0069 / MINEP of March 08, 2005 fixing the modalities of operations whose realization is subjected to an EIA.

The aforementioned legal instruments set out four fundamental and indispensable criteria for the admissibility of EIAs relating to large dams:

  1. The construction of a large dam must be part of an energy policy in which development needs and objectives are clearly formulated through an open and participatory process carried out before the definition and evaluation of the various development options. of energy resources 1

  2. Priority should be given to improving the efficiency and sustainability of existing water, irrigation and power supply systems;

  3. Social and environmental factors should be given the same importance as financial and economic aspects in the evaluation of options;

  4. Les populations locales et les Organisations Non Gouvernementales impliquées doivent ètre informées et consultées2. Le consentement des populations affectées par la construction du barrage et des ONG doit ètre libre. Ces dernières doivent ètre préalablement informées des documents de l’EIE.

Le consentement libre et préalable suppose qu’un temps suffisant soit alloué à toutes les parties prenantes pour évaluer, consulter et participer au projet.

Selon les directives de la Commission Mondiale des Barrages, un consentement informé crée comme obligation à l’Etat et au promoteur du projet la définition des critères d’accès du public à l’information, d’organisation des réunions et de traduction des documents majeurs (documents de l’EIE) en des langues que les populations locales comprennent. Les populations doivent ètre éduquées par rapport au recommandations de la CMB. L’accès à l’information et à un soutien juridique est assuré à tous les groupes concernés, notamment aux populations autochtones, aux femmes et autres groupes vulnérables, afin de favoriser leur participation éclairée aux processus décisionnels3.

Une adhésion démontrable du public à toutes les décisions clé est obtenue à travers les accords négociés dans le cadre d’un processus ouvert et transparent, mené de bonne foi avec tous les groupes concernés.

Au plan national, plusieurs dispositifs juridiques réglementent la construction des barrages. Il s’agit notamment de :

  • l’article 11 du décret N°2005/0577/PM du 23 février 2005 fixant les modalités de réalisation des EIE qui dispose que: “La réalisation des EIE doit ètre faite avec la participation des populations concernées à travers des consultations et audiences publiques, afin de recueillir les avis des populations sur le projet “;

  • l’article20 de l’arrèté N°0069/MINEP du 08 mars 2005 fixant les modalités d’opérations dont la réalisation est soumise à une EIE qui prévoit que le contenu du rapport d’une EIE doit comprendre entre autres le programme d’informations et de sensibilisation ainsi que les procès verbaux de réunion de concertation tenues avec les populations, les ONG, les syndicats, les leaders d’opinion et autres groupes organisés.

Messieurs les Ministres, nous sommes dans le regret de constater que ces critères de bonne conduite ont été ignorés par l’Agence de Régulation du Secteur de l’Electricité (ARSEL) qui est le promoteur de ce projet.

Lorsque nous regardons le critère portant sur l’obligation d’information et de consultation des Organisations non gouvernementales et de la Société Civile sur la politique énergétique nationale avant toute définition et évaluation des différentes options en matière de développement des ressources énergétique, nous constatons qu’il a été bafoué. Les ONG ont été écartées du processus d’élaboration du nouveau plan énergétique national qui couvre la période allant de 2005 à 2030. Il leur a été refusé la possibilité de consulter ce document jusqu’à l’heure actuelle. Pourtant, lors de l’atelier du deux septembre 2005 tenu à Yaoundé sur le thème: “réunion d’informations sur les dossiers urgents du secteur de l’électricité”, les responsables du ministère de l’Energie et de l’Eau ont affirmé que le barrage de LOM–PANGAR fait partie intégrante de ce plan. Il apparaît clairement qu’il est impossible de valider le projet de barrage de LOM– PANGAR sans s’interroger sur le bien–fondé des choix stratégiques gouvernementaux. Ceci est d’autant plus important lorsqu’on considère que LOM–PANGAR est la première phase d’une série de neuf barrages qui seront construits sur un mème cours d’eau.

S’agissant du critère qui demande d’accorder une priorité à l’amélioration de l’efficacité et de la viabilisation des barrages existants, nous constatons que les EIE menées ont plutôt accordé une priorité à la comparaison entre l’énergie thermique et l’énergie hydro–électrique, ignorant de fait l’amélioration de l’efficacité et de la viabilité des barrages existants et la valorisation d’autres sources d’énergie renouvelables.

L’évaluation environnementale de certains barrages de retenue existants au Cameroun, notamment les barrages de Bamendjin et de Mapé, menée par Global Village Cameroon a montré que la capacité de stockage en eau de ces barrages vieux de 30 et de 25 ans respectivement a grandement diminué du fait qu’ils ne sont pas entretenus, entraînant la chute de la capacité de production de l’électricité au niveau des barrages de production de Song Lou lou et d’ Edéa.

S’agissant du critère selon lequel, les aspects financiers et économiques ne doivent pas revètir plus d’importance que les facteurs environnementaux et sociaux, les résultats des EIE du projet de barrage de Lom–Pangar, tels que présentés par ARSEL lors de l’atelier de restitution finale du 21 octobre 2005 à Yaoundé, accordent plus d’importance aux aspects financiers et économiques par rapport aux facteurs environnementaux et sociaux dans l’évaluation des options.

Nous nous souvenons en outre, que le pipeline Tchad–Cameroun a subi une modification sensible de son tracé et le pont sur le LOM a été démonté pour préserver la réserve de DENG–DENG qui est une forèt protégée. Faisant fi de ces efforts de ces efforts de préservation de la richesse de ce patrimoine commun de l’humanité, ARSEL a plutôt opté pour l’ennoiement d’une partie de cette réserve.

Au surplus, selon le groupe d’ingénieurs ayant mené les EIE, du point de vue environnemental, le barrage de LOM–PANGAR n’est pas la meilleure option sans aménagement d’autres barrages tels que celui de NACHTIGAL. Contrairement aux raisons invoquées pour justifier le projet, à savoir la résorption du déficit énergétique national, nous ne pouvons pas manquer de souligner le rôle trouble joué par le groupe ALCAN dans le projet LOM–PANGAR. En effet, ce dernier menace de fermer sa branche camerounaise (ALUCAM) dans cinq ans au cas où le gouvernement camerounais n’arriverait pas à augmenter sa capacité énergétique. Ce rôle trouble a été confirmé par la signature de la lettre d’intention le 26 octobre 2005 entre le gouvernement du Cameroun et le groupe ALCAN.

Selon cette lettre d’intention, le groupe ALCAN financera les études de faisabilité et la construction du barrage de production de Nachtigal sur la Sanaga. Cela permettra d’augmenter la capacité de production du groupe ALCAN de 260 000 tonnes contre 100 000 tonnes aujourd’hui. Depuis des années, ALUCAM est le plus grand consommateur de l’énergie électrique au Cameroun et la paie à vil prix. Sa consommation a évolué de 3 à 8 FCFA le KWH contre 12 FCFA pour la majorité des industries d’aluminium subventionnées dans le monde. Les populations que nous avons rencontré sur le terrain sont terrorisées à l’idée d’ètre taxés d’opposant à un projet qui œuvre pour le développement de la Nation et de la région de l’Est. Mais ce qu’elles ne savent pas, c’est que ce projet sert en réalité les intérèts d’une entreprise: ALLUCAM.

Le critère qui fait allusion à l’obligation d’information et de consultation des populations affectées ainsi que les Organisations de la Société Civile (OSC) a également été ignoré. Les OSC ont été écartées du processus d’information et de consultation pendant la phase de l’EIE. Par voie orale et écrite, Global Village Cameroon a sollicité en vain l’obtention des documents relatifs à l’ Etude d’Impact Environnemental.

Le 09 novembre 2005, un haut cadre de l’ARSEL, chargé des études du projet de barrage de Lom– Pangar, nous a confié qu’il a reçu des ” instructions fermes de ne pas collaborer directement avec les ONG”. Selon cette mème source, le public ne pourra accéder aux documents de l’EIE qu’en consultant le site web de l’ UICN. Cette mesure limite grandement le droit des populations locales qui n’ont aucune notion de l’Internet et des ONG à ètre informées sur le projet. Les populations locales qui sont illettrées et pauvres ne peuvent ni accéder à cette technologie de la communication, ni comprendre les tenants et les aboutissants du projet. Obliger ces acteurs à un téléchargement coûteux d’un si volumineux document est une stratégie délibérée pour empècher les observations critiques de l’EIE.

Cette pratique est rétrograde, comparativement à ce que nous avions observé lors de la construction de l’oléoduc Tchad–Cameroun. Des centres de lecture avaient été crées pour permettre au public d’ètre informé sur le projet et de faire des observations critiques sur le document du projet.

Enfin, certains facteurs restent indispensables pour la recevabilité du document de l’EIE. Il s’agit notamment des documents sur les impacts cumulatifs du pipeline et du barrage sur l’environnement et les communautés locales dont le gouvernement aurait commandité les études. La construction du barrage entraînera l’ennoiement d’une partie du pipeline sur une vingtaine de tronçons totalisant environ 4,6km. Cela augmentera le risque de déversement accidentel des hydrocarbures. Si une telle éventualité survenait, cela causerait une catastrophe écologique par la pollution généralisée des eaux du barrage.

De plus, le contrat additif du pipeline Tchad–Cameroun en vue de définir les responsabilités des parties pour la gestion des impacts cumulatifs du pipeline et du barrage de Lom–Pangar n’est pas encore signé.

Vu ce qui précède nous demandons:

A Monsieur le Ministre de l’Environnement et de la Protection de la Nature de ne pas recevoir les EIE tant que les préalables ci–après ne sont pas respectés;

  • La mise à la disposition des OSC et des autres acteurs impliqués de tous les documents publics relatifs au secteur énergétique et particulièrement à l’EIE du projet Lom–Pangar. Il s’agit notamment du nouveau Plan Energétique National, des 25 études thématiques, du Plan d’Action Environnemental (PAE) , du Programme d’Appui aux Actions d’Encadrement et de Développement (PAD) relatifs au projet de barrage de Lom–Pangar;

  • L’octroi aux OSC et aux acteurs concernés par le projet d’un délai de quatre mois pour formuler leurs observations critiques relatives aux documents des Etudes d’ Impact Environnemental;

  • La production de toutes les études sur la gestion des impacts cumulatifs du pipeline et du barrage. Celles–ci doivent faire partie des pièces indispensables des EIE à fournir avant tout examen de leur recevabilité;

  • La réalisation des études de faisabilité du barrage de NACHTIGAL

A Monsieur le Premier Ministre de suivre les requètes des OSC et de veiller à ce que des solutions appropriées y soient apportées.

Ampliations:

  • Ministère de l’Energie et de l’Eau
  • Ministère de la Forèt et de la Faune
  • Agence de Régulation du Secteur de l’Electricité
  • Banque Mondiale
  • Agence Française de Développement
  • UICN, Bureau Régional pour l’Afrique Centrale
  • Ambassade des Etats Unis

Equipe de travail:

Jean Koueda, Thang Dieudonné, Nongni Bakker, Wirsiy Emmanuel Binyuy, Tameta Ngouffo Noel

Global Village Cameroon

BP 3158 Yaoundé Cameroun
Tél (237) 223 31 52 Fax (237) 222 43 31
E–mail: global@cenadi.cm ou globalvillage@camnet.cm
Web: www.globalvillagecam.org

Notes

  1. Barrages et développement, un nouveau cadre de prise de décisions, le Rapport de la Commission Mondiale des barrages, Novembre 2000; Tour d’horizon; p.28

  2. NONGNI BAKKER et WIRSIY EMMANUEL; Evaluation à mi– parcours de l’information et de la consultation des population riveraines pendant la phase de l’Etude d’Impact Environnemental du projet de construction du barrage de LOM– PANGAR; Global Village Cameroon; Septembre 2005,pp 3–5

  3. Barrages et développement, op.cit.pp28